L71: Perdues dans la montagne

Messages : 1989 Date d'inscription : 27/01/2016

La fille aux cobras est partie explorer la plage et elle n'est pas revenue. Au début, Amiya ne s'inquiétait pas plus que ça. Il était tard et l'enfant reviendrait dans la nuit, quand elle aurait faim. Mais voilà, c'est le matin et toujours pas d'Ajeya en vue. La femme rouge a pourtant retourné l'hôtel, cherché partout, peut-être qu'elle s'était endormie dans un coin, mais rien.

Alors, en début d'après-midi, elle a pris son sac, de quoi donner des soins si nécessaire, de quoi manger. Et la voilà partie à son tour, sans prévenir. Tellement inquiète pour la gamine qu'elle oublie que son absence peut aussi en inquiéter plus d'un.

Elle fait la plage en long, en large, en travers. Personne. Alors elle regarde les montagnes et loin de sentir la fatigue qui l'accable, entreprend de suivre les sentiers praticables, ponctuant sa route de cris:

"Ajeya! Ajeya!"

Elle finira bien par tomber dessus, comme le jour tombe sur la montagne...

Messages : 491 Date d'inscription : 27/01/2016

Partie explorer les environs à la recherche de reliques de ce que fut le monde et aussi pour s'éloigner un peu des adultes, Ajeya avait marché le long de la plage.

Puis apercevant une lueur étrange au sommet d'une colline, elle s'était, lentement mais surement, laisser guider vers les hauteurs du tertre.

Devant elle un spectacle fascinant, une étendue de verre pilé recouvrait la colline et envoyait cette étrange lueur. On avait l'impression que quelqu'un s'était amusé à broyer l'ensemble des vitres d'un gratte ciel.

C'est à ce moment que Manik avait décidé de partir à l'aventure et de s'engouffrer dans une cavité aux pieds de la masse de diamants de pacotilles.

Depuis, assise en tailleur sur une pierre plate devant le trou, elle attendait que le cobra veuille bien en ressortir.

Presque hypnotisée par les lueurs cristallines de la colline, elle n'avait pas fait attention au temps qui passait.

Messages : 1989 Date d'inscription : 27/01/2016

L'heure et les astres tournent et il fait nuit quand Amiya arrive, au détour d'un chemin, devant la colline de verre pilés qui scintille sous la lune et devant une gamine assise en tailleur.

"AJEYA!"

L'indienne lâche toute ses affaires au sol et fond sur elle comme l'oiseau sur sa proie, comme une mère qui retrouve son enfant perdue.

"Je te cherche depuis des heures! Tu aurais pu me répondre! J'étais si inquiète..."

Elle la serre si fort qu'elle pourrait lui broyer les os...et en plus, elle lui pleure dessus, sans classe, sans retenue. Nan, à moins que la petite se débatte, elle ne la lâchera pas de sitôt!

Messages : 491 Date d'inscription : 27/01/2016

Ajeya est sortie de sa torpeur pas l'irruption d'Amiya et son étreinte puissante.

Je ... je ... j'étais subjuguée par cette colline si brillante et ... et ... et puis j'attends Manik, il est parti dans un trou.

Il est si tard ?

Messages : 1989 Date d'inscription : 27/01/2016

Elle desserre mais ne lâche pas.

"Oui, il est si tard. Une nuit et tout une journée que tu es partie. Je t'ai apporté à manger. Es-tu blessée? Est-ce que tout va bien?"

Et un regard au trou.

"Mangeons, peut-être que l'odeur va le faire sortir..."

Elle lâche d'un bras pour tirer de sa besace des naans aux légumes, froids depuis le temps, et des fruits.

"Tiens, mange. Tout!"

Messages : 491 Date d'inscription : 27/01/2016

Ajeya prend le repas apporté par Amiya et l'avale goulument.

Je voulais pas ... blurp ... t'inquiéter mais ... blurp ... cette colline elle brillait, c'était ... glup ... si beau.

Elle essuie le coin de sa mouche avec sa manche.

Tu avais déjà vu une chose comme ça ?

Et elle montre, en balayant du bras, l'étendue de verre concassé devant elles.

Messages : 1989 Date d'inscription : 27/01/2016

Elle se tourne à son tour vers la masse brillante.

"Non. C'est très beau. On devrait en rapporter un peu. Les fakirs dorment sur des lit à clous, peut-être que les sadhus ont des lits en verre...ça pourrait être une joli cadeau!"

Elle attrape un naan et l'agite devant le trou.

"Manik? Tsss tssss tsss tssss? Sors de là!"

Et à Ajeya:

"Si on enfume le trou, est-ce qu'il va sortir? ça marche pour le gibier je crois..."

Messages : 491 Date d'inscription : 27/01/2016

Je sais pas ...

non, je crois que je vais jouer un morceau pour essayer de le faire sortir.

Elle sort son pungi et commence à jouer une mélodie en tapant du pied par terre.

Messages : 1989 Date d'inscription : 27/01/2016

Et c'est Amiya qui est charmée. Elle oscille de la tête, puis du haut du corps, portée par la musique...jusqu'à se lever, prendre un gobelet en métal dans sa besace, le remplir de verre et accompagner Ajeya dans sa chanson. Un peu de musique, ça faisait longtemps...

Messages : 491 Date d'inscription : 27/01/2016

Tout en continuant à jouer et à taper du pied, Ajeya voit la tête de Manik sortir du trou.

Elle essaye de faire signe à Amiya par des petits mouvements de têtes mais leur raanee semble emportée par la mélopée.

C'est donc une Ajeya pleine de tics qui essaye de faire comprendre à Amiya que le cobra est en train de sortir et qu'il faudrait l'attraper.

Messages : 1989 Date d'inscription : 27/01/2016

L'attraper? Sérieusement? Amiya s'arrête. Elle n'a jamais attrapé de serpent de sa vie, surtout pas un avec des crochets!

Pourtant, elle est bien décidée à ramener Ajeya auprès des siens. Et surtout, Shankar doit être inquiet et penser qu'elle s'est vraiment enfuie...bon, allez, elle se lance. Elle contourne le trou sur la pointe des pieds, s'accroupi, attend que le tête sorte un peu plus...

Et d'un coup sec, empoigne le reptile derrière la tête! C'est comme ça qu'on fait non?

Messages : 491 Date d'inscription : 27/01/2016

Ajeya abandonne le pungi en se levant prestement. Elle sort alors un sac de sa poche et le tient devant Amiya.

Balance le dedans !

Le regard d'Ajeya est assez admiratif, elle n'imaginait pas sa raajakumaaree aussi courageuse.

Messages : 1989 Date d'inscription : 27/01/2016

C'est froid, ça gigote et maintenant qu'elle réfléchit à ce que peut un cobra en colère, c'est carrément terrifiant.

"Il...il va..."

Elle est toute blanche et doit serrer un peu fort, à en croire les soubresauts du serpent...

"Approche le sac..."

Et quand le sac est suffisamment proche et grand ouvert, elle balance la bête dedans comme elle aurait balancé une couche de bébé malade. Ouais, ça pue ça chlingue et plus vite on en est débarrassé mieux on se porte.

A peine ses doigts se sont-ils écartés, le cobra en pleine chute, elle recule de plusieurs pas, trébuche et tombe sur les fesses, les yeux grands ouverts. Ne vous moquez pas, il pourrait s'enrouler et bondir sur elle comme un ressort!

"Ferme! Ferme!!"

Messages : 491 Date d'inscription : 27/01/2016

Ajeya referme le sac au sol, colle son pied dessus et commence à fouiller dans ses poches.

Au sol la toile de jute est agitée de spasmes frénétiques. Pour sur le cobra la dedans est vraiment très remonté.

Ayant enfin trouvé un lien, elle s'applique à faire un noeud. Elle prend le sac et au moment de se redresser, une violent secousse rageuse du cobra, la déséquilibre.

Déséquilibrée, elle recule et son talon percute une pierre, perdant l'équilibre, elle tombe en arrière et s'affale dans le verre pilée.

Aaa aïe ....

La suite est une longue litanie de gémissements et de pleures.

Messages : 1989 Date d'inscription : 27/01/2016

"Ajeya!"

Amiya se lève d'un coup, oubliant le serpent, poussée par son instinct maman poule. Elle n'hésite pas un instant à marcher dans le verre, s'enfonçant les chevilles et s'entaillant pieds et jambes, pour venir chercher la petite fille.

Elle a déjà oublié le cobra potentiellement rancunier, trop occupée à entourer sa maitresse dans ses bras, pour la soulever et la porter loin de la butte. Elle la repose finalement sur le sentier par où elle est arrivée.

"ça va? Ne pleure pas ma belle, c'est fini. Calme toi. Je vais te soigner, tout va bien se passer."

Dit-elle, couverte de son propre sang et les bras pleins de petits bouts de verres. Mais pour l'instant, elle ne s'en rend pas compte, trop occupée à caresser les cheveux de la gamine pour la calmer.

"Chut ma chérie, chut...."

Messages : 491 Date d'inscription : 27/01/2016

Ajeya est assise, derrière elle Amiya enlève patiemment les morceaux de verre.

Pour supporter l'ensemble et dédramatiser, elle répète comme un mantra :

Je suis un fakir, je suis un fakir, je suis Aïe ! un fakir ...

Messages : 1989 Date d'inscription : 27/01/2016

Elle rit en retirant les derniers bouts de verre, puis sort de l'huile de sa besace, glisse les mains sous le tee-shirt de la fillette pour adoucir sa peau et désinfecter.

"Il faudra dormir sur le ventre ma jolie...Allez, rentrons, je suis sûre que tout le monde s'inquiète!"

Et surtout, elle aussi a besoin de se faire retirer quelques morceaux de verre...

"Tu sais où est Tufan?"

Elle arrête de sourire. C'est solidaire un cobra? ça venge ses amis quand on les maltraite en les jetant dans de sacs?

Messages : 491 Date d'inscription : 27/01/2016

J'ai laissé Manik dans sa boite dans la tente.

Elle énonce ça comme une chose totalement naturelle comme si elle parlait d'un chaton bien sage.

Puis regardant le bras d'Amiya.

Je suis désolée de t'avoir fait peur et de t'avoir conduit ici. A cause de moi tu es blessée.

Messages : 1989 Date d'inscription : 27/01/2016

Elle lui sourit.

"Tant que tu vas bien, ce n'est pas grave. ça m'a fait du bien de me promener tu sais? J'ai pu réfléchir à beaucoup de chose en te cherchant. Tu vois, il y a peu, je voulais partir. Et finalement, il suffit que je n'ai plus ta bouille sous les yeux pour m'inquiéter. Il suffit que je m'éloigne de Shankar pour qu'il me manque."

"Je devrais te remercier de t'être perdue. Mais ne recommence pas d'accord?"

Elle lui fait un clin d'oeil puis lève ses bras, contractant ses muscles.

"Et j'ai même pas mal. Il en faut plus pour m'arrêter! Moi aussi je suis une femme forte tu sais? J'ai plus de muscle que toi!"

Elle tente une démonstration de force, voulant soulever une grosse pierre...qui finalement, reste bien là où elle était. Dommage pour sa crédibilité...en tout cas, son ridicule la fait rire.

"La force, c'est parfois plus dans la tête que dans les bras..."

Messages : 491 Date d'inscription : 27/01/2016

Ajeya pouffe de rire.

Nous ne sommes que des femmes fortes dans notre nouvelle famille. Mais, nous ne le montrons pas pour que nos hommes continuent à penser qu'ils le sont plus et que leur Inde n'est pas morte quand tout à cessé.

Elle était belle cette colline, tu crois qu'il y avait quoi la haut avant ?

Messages : 1989 Date d'inscription : 27/01/2016

Elle oscille de la tête.

"Exactement, car un homme vexé, c'est pire qu'un enfant qui fait un caprice...je ne parle pas de toi bien sûr, tu en fais peu, mais tu as du voir ces gamines pourries gâtées qui pleurent et se roulent par terre pour une poupée! Ils sont exactement pareil! De vraies chochottes! Alors il vaut mieux leur faire plaisir si on veut être tranquille..."

Elle se fige. Et si Ajeya pensait que son époux était comme ça?

"Ne dis jamais à Shankar que je t'ai dis ça, d'accord?"

Tant que lui ne le sait pas...elle peut penser ce qu'elle veut!

Messages : 491 Date d'inscription : 27/01/2016

Elle n'aura pas de réponse sur la colline. Peut-être Amiya ne la voit-elle pas comme elle. Comme les autres adultes, Amiya n'arrive pas à franchir le gouffre qui sépare l'ancien du nouveau monde. Elle reste une jambe de chaque côté, en grande partie rivée dans les principes de cet autre monde qui n'est plus.

Tant pis ... de toute façon le campement est en vu.

La première arrivée à gagné !

Crie-t-elle en partant vers les tentes à grandes foulées.

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