Shankar sourit, comme piqué de nostalgie.
Majestueux ? Oui. Par endroits. A d'autres, je préfèrerais me baigner dans mes toilettes. Enfin, celles que j'avais du temps d'avant. Celles avec le jet qui... Voilà.
Car c'est de cette partie là dont j'aimerais vous parler.
Euh, la partie du Gange la plus sale, je voulais dire. Celle que les brahmanes considèrent comme la plus sacrée, poussant des milliers de gens dans le lit du choléra. Pourtant, plus nombreux encore sont ceux qui disent qu'il ne faut pas chercher le sacré ou les Dieux dans les fleuves sacrés, les belles idoles ou même les rites, mais bien en soi même, et que ces rites et symboles ne sont la que pour nous aider à nous souvenir et à transmettre sans même employer l'écriture, propre au kaliyuga.
C'est d'ailleurs ce que je me disais quand j'utilisais mes congés pour aller aux USA plutôt que chez mes parents en bord de rive.
Enfin, voilà. Du fleuve le plus pollué du monde est sorti pourtant bien des miracles.
Il ménage une pause, le temps que tout le monde arrive à peu près à raccrocher les wagons. Ses pieds touillent l'eau un bref instant puis il reprend :
Et je ne parle pas des dauphins ou des tortues nécrophages, que les sadhûs mangent quand il ne s'agit pas des cadavres. Mais bien de ceux qui en sont sortis purifiés.
Savez-vous que ces choses sont vraies ?
Savez-vous même que la science a pu avancer en comprenant le mystère de Gange ?
Car c'est ici que fut découvert par les anglais, un virus qui tue les microbes, dans les eaux les plus fécales de Varanasi, il y a plus d'un siècle. Des millénaires durant, notre peuple fut béni de ces bienfaits, quand d'autres y trouvaient la mort.
Que savez-vous, mes amis, de ce qui lie la science à la religion ?
As-tu eu la chance de voir notre fleuve Isran ?